Il y a quelques temps, lors d’une discussion au sujet des romans qui traitent de l’adolescence et du lycée, on m’a recommandé de lire le petit dernier d’Adèle Bréau. Je ne connaissais pas du tout l’autrice, voici donc mon avis tout perso et sans à priori sur ce roman.
C’est quoi, l’histoire ?
Ce livre, l’odeur de la colle en pot, est une espèce de madeleine de Proust pour tous ceux qui ont grandi dans les années 90. Caroline en est l’héroïne, du haut de ses 13 ans, elle qui affronte la rentrée scolaire dans un nouveau collège et qui une fois rentrée à la maison gère comme elle le peut sa vie familiale qui s’effrite lentement mais sûrement.
On ne va pas se mentir, c’est difficile de résumer ce livre car il n’y a pas de rebondissements majeurs, pas vraiment de fil d’Ariane non plus, on se contente de s’immerger au fil des pages dans l’univers d’une jeune fille qui cherche sa place auprès des autres.

Et quand je dis « les autres », je pense évidemment aux amis du collège, ils sont si importants à cet âge !… Mais aussi aux amoureux, car Caroline va vivre son premier amour ; et puis il y a aussi les parents dont Caroline s’émancipe en douceur, plus préoccupée par ses propres petites histoires de cœur que par leurs gros problèmes d’adultes. Sans être complètement détachée émotionnellement des adultes, on la sent évoluer vers une empathie un peu distante, avec une touche de jugement par-dessus car les parents ne sont plus des super héros à cet âge, on commence à voir tous leurs petits défauts… Malgré tout Caroline est une adolescente pleine de bienveillance pour ses proches, et sans raconter tout le livre, c’est moins son histoire à elle que celle de toute une génération.
La dernière génération qui a eu le droit de grandir sans la pression des réseaux sociaux ou le harcèlement sur Internet car les smartphones n’existaient pas ! Si l’on voulait parler à ses copains, il fallait argumenter pendant des heures avec les parents pour pouvoir téléphoner…. car oui !, passer un simple coup de fil était un acte militant pour les ados, les appels étant à l’époque facturés à la minute. (Aaaaah France Télécom, l’autrice de cette chronique a toujours de la rancœur…..)
Tout le livre est truffé de références aux années 90, et je pense qu’il faut avoir grandi à cette période-là pour vraiment comprendre l’âme de ce roman.
J’imagine qu’il sera difficile aussi pour de jeunes lecteurs de comprendre l’impact de la séparation des parents sur la petite vie de Caroline car aujourd’hui le divorce est tellement banalisé…. alors que dans les années 90, il commençait tout juste à éclater les familles. Il plongeait les enfants et les adolescents dans l’angoisse de l’avenir incertain, on ne savait pas gérer ça comme maintenant, et il y avait finalement assez peu de représentation de familles éclatées dans les médias. On ne savait pas trop à quelle sauce on allait être mangé mais on était bien conscient d’être dépossédé de l’idéal familial auquel tous les enfants aspirent.
Mon avis sur l’Odeur de la colle en pot.
Cette histoire n’a pas d’autre ambition que d’être une tranche de vie d’une adolescente toute simple, et pourtant, je suis sortie de cette lecture un peu nostalgique car j’étais moi aussi toute jeune dans les années 90 et j’en avais oublié tellement de choses…
Par contre j’ai refermé le livre en ayant aussi un peu le bourdon, peut-être aussi parce que ce roman m’a rappelé un peu trop bien à quel point on a vécu contraints et forcés les gros changements sociaux qui nous ont amené à nos habitudes d’aujourd’hui.
On a connu le meilleur et le pire. L’époque où les familles étaient unies (en tout cas en apparence), et les premiers divorces, familles éclatées, familles recomposées, etc. On a connu le bonheur de rentrer chez soi après les cours, fermer la porte et oublier le collège jusqu’au lendemain. Pas de réseaux sociaux pour nous rappeler la misère de notre vie sociale…
Le roman est bien écrit, plein de douceur et de bienveillance, ça m’a un peu fait penser à du Marcel Pagnol par son côté « chroniques de l’enfance » mais en plus sombre tout de même. Adèle Bréau n’a pas donné à sa Caroline les cigales de Pagnol ou les joyeuses vacances en famille à la campagne pour qu’elle puisse se dire que la vie n’est pas si affreuse que ça. A la place, Adèle Bréau a donné à son héroïne le temps de grandir, et c’est déjà bien.